.................L' INFINI
Toujours j'aimai cette hauteur déserte
Et cette haie qui du plus lointain horizon
Cache au regard une telle étendue.
Mais demeurant et contemplant j'invente
Des espaces interminables au-delà, de surhumains
Silences et une profonde
Tranquillité que pour un peu se troublerait
Le cœur. Et percevant
Le vent qui passe dans ses feuilles — ce silence
Infini, je le vais comparant
A cette voix, et me souviens de l'éternel,
Des saisons qui sont mortes et de celle
Qui vit encor, de sa rumeur. Ainsi
Dans tant d'immensité ma pensée sombre,
Et m'abîmer m'est doux en cette mer.
Leopardi, in D'une lyre à cinq cordes, Traductions de Philippe Jaccottet, 1946-1995, nrf Gallimard