samedi 1 janvier 2011

Philippe Jaccottet (9)

...................AGRIGENTE,
...................1er janvier

Un peu plus haut que cette place aux rares cibles,
nous cherchons l'escalier d'où la mer est visible,
ou du moins le serait si le temps était clair.
— Nous avons voyagé pour la douceur de l'air,
pour l'oubli de la mort, pour la Toison dorée...
Malgré le chemin fait, nous restons à l'orée,
et ce n'est pas ces mots hâtifs qu'il nous faudrait,
ni cet oubli, lui-même oublié tôt après... —
Il commence à pleuvoir. On a changé d'année.
Tu vois bien qu'aux regrets notre âme est condamnée :
il faut, même en Sicile, accepter sur nos mains
les mille épines de la pluie... jusqu'à demain.

Philippe Jaccottet, L'Effraie et autres poésies, nrf Gallimard