lundi 28 mars 2011

日本 (2)


Dans le secret du cœur
le printemps me manque —
j'ai vieilli

Awano Seiho

jeudi 17 mars 2011

日本 (1)



Qu'ils sont tristes
ces cadavres qui s'embrassent.
Clair de lune.

Tokiko Takahashi

samedi 5 mars 2011

Walt Whitman (1)


.................................
Feuilles d'herbe
...
La buée de mon propre souffle,
Échos, clapotis et murmures feutrés . . . racine d'amour, fil de soie, fourche et vigne,
Mon expiration et mon inspiration . . . les battements de mon cœur . . . . le passage du sang et de l'air dans mes poumons,
L'odeur des feuilles vertes et des feuilles sèches, du rivage et des rochers sombres de la mer, du foin, dans la grange,
Le son des mots éructés par ma voix . . . mots livrés aux tourbillons du vent,
Des baisers à la dérobade . . . . des étreintes . . . . des bras qui enlacent,
Le jeu de la lumière et de l'ombre sur les arbres aux branches souples qui ondulent,
Le plaisir d'être seul ou dans la cohue des rues, le long des champs et des collines,
La sensation de parfaite santé . . . . le trille du plein midi . . . . le chant de moi qui me lève du lit à la rencontre du soleil.

Tu trouves que cela fait beaucoup, un millier d'acres ? Et la terre, tu la trouves immense ?
Apprends-tu à lire depuis si longtemps ?
Es-tu si fier de saisir le sens des poèmes ?

Reste avec moi ce jour et cette nuit, et tu connaîtras l'origine de tous les poèmes,
Tu jouiras des bienfaits de la terre et du soleil . . . . il reste des millions d'autres soleils,
Tu n'accepteras plus rien de deuxième ou de troisième main . . . . tu ne regarderas plus avec les yeux des morts . . . . et ne te nourriras plus des spectres qui hantent les livres,
Tu ne regarderas pas davantage avec mes yeux et n'accepteras rien de moi.
Tu écouteras toutes les parties et feras le tri de toi-même.
[...]

Walt Whitman, Feuilles d'herbe (1855), trad. E. Athenot, José Corti

vendredi 4 mars 2011

Fernand Léger (1)

Les femmes au perroquet, Bronze

Les femmes au perroquet, Terre cuite émaillée

Abdelwahab Meddeb (1)

........BLANCHE LA VILLE (extrait)

L'homme y vogue dans les airs
où qu'il soit il ne perd pas le ciel
et la mer toujours à la hauteur
du patio baignoire qui flotte entre
les deux bleus que les oiseaux seuls
déchirent deux trois coups d'ailes
vous emportent à l'éventail des pins
haies sur le profil des jardins
l'arche et le pont sont des corps
qui étendent des passerelles
entre les vivants et les morts
je monte et je redescends
je remonte encore j'aperçois l'ombre d'Aya
je la hèle la nuit sur l'autre trottoir
à chaque porte elle presse le pas
elle ne se retourne pas ses talons résonnent
et vibrent au silence des lampadaires
miroir où j'entends frémir les palmes
les arcs dansent à l'air de l'automne
sur la chaussée noire humectée de larmes
le cœur des pleureuses module son cri
elles forcent le thorax autour de la tombe
pierre blanche coffre de terre
qui enferme le corps du rebelle
les paroles rassemblent ses restes
et les déportent vers l'adhésion posthume
pour Aya j'ai exhumé un vieux poète
qui chantait l'ivresse l'herbe ployait
au pied de sa tombe un cep avait cru
[...]

Les Poètes de la Méditerranée, Poésie/Gallimard

mercredi 2 mars 2011

Florac (1)










...........LE MOT

Je ne parle pas depuis des jours
Je marche durant des heures
Silencieux
J'écoute la mer, j'écoute les arbres

Le silence comme une extase
Le silence comme une retraite
Le silence comme une force
Le silence comme une folie

Soudain un mot jaillit de ma bouche
Je m'entends dire un mot, unique
Mot miraculeux qui émerge des heures de silence
Mot d'évidence, vérité des vérités

Mais ce mot qui me dit tout de moi et du monde
rapidement
je le perds, je l'oublie !
... !

Florac, Correspondances 1953-2003. Horizons

mardi 1 mars 2011

Mohammed al-Sghaier Ouled Ahmed (2)

...........VIENS

Viens... Ou que le songe t'amène
Viens... Je suis la lèvre interdite

Pose ma joue sur les tiennes une année
Et dors... Nous n'aurons plus de parole

Je suis le visionnaire... Et mes chemins sont trois
Devant ou devant ou devant

Et toi le blé aux mains qui poussent
Le soleil par où la paix commence
Viens... Après qu'il avance et avance
Viens... Avant que l'obscurité ne parvienne

Pour le premier arrivant mon cœur frémira
Et de dessus mon corps le marbre on ôtera

Là j'ouvrirai ma tombe et vivant me lèverai
Combien d'amants l'amour n'a-t-il fait ressusciter

trad. Tahar Bekri, in : Les Poètes de la Méditerranée, Poésie/Gallimard

Abdelmonem Ramadan (1)

..............Invocation (extrait)

Au nom du Père
du Fils
du Saint et au nom de Dieu
et de la petite sœur Narimane.
Au nom de Nabila
ou Dorreya
Au nom de Maha
et des membres sur les murs du temple
Au nom du temple
au nom de l'ange du repos
Quand le roi sortit à la rencontre de ses frères
Il s'honorait du vin de la famille
buvait deux carafes et jouait :
Ma tête est forgée d'un or pur
Mon œil est un vol de pigeon sur les canaux
Les mèches de mes cheveux dénoués sont noires comme un corbeau assis sur un tertre
Mon ventre est d'ivoire broché de hyacinthe bleue
mes lèvres sont d'iris et de basilic
Mes mains sont chargées d'ornements
[...]

trad. Catherine Fahri, in : Les Poètes de la Méditerranée, Poésie/Gallimard

Paesaggio (2)


Paesaggio (1)


Mohammed al-Sghaier Ouled Ahmed (1)

......Je n'ai pas de problème

Je n'ai pas de problème
Tout chat que je vois seul errant
Je l'embrasse
Tu es mon fils le grand
Et m'en retourne...
A ma solitude

Jamais
Je n'ai de problème
Après dix bouteilles vertes
Dont je ferai les bases de ma cité parfaite
Et nommerai mon commensal à sa tête
Puis ma poésie dictera sa loi
Je ramènerai les soldats à leur devoir sentimental
Et m'en irai...
A mon verre oublié

Je n'ai pas de problème

Quand je serai mort
Seuls auront marché derrière moi ma plume
Mes chaussures
Et le rêve des bourreaux
J'ai maintenant à reprendre mes larmes
Du fleuve
De la mer
De sa joue
Des trente années sans joie
De l'épi humide

Je n'ai pas de problème

Les cieux
S'ils sont sept
Ou s'ils sont cinq
La pluie viendra
Et les terres
Si elles sont sept
Cinq
Ou une
Elles suffiront aux hommes

Je n'ai pas de problème

J'irai seul voir Dieu
Et lui dirai
Mon amour
Je voudrais un endroit qui bannit la terre
L'enfer
Et le paradis

Jamais
Je n'ai pas de problème

Quand les fleurs irritent mes poches
Je les dessine avec la plume
Et le drapeau...
Et quand ce drapeau dénude mes fils
Je le déchire étoile par étoile
Tandis que je recouds leur nudité
Tandis que j'embrasse la terre sans nommer Dieu

Je n'ai pas de problème
Je n'ai pas de problème

trad. Tahar Bekri, in : Les Poètes de la Méditerranée, Poésie/Gallimard