mercredi 21 mars 2012

Nicolas Bouvier (8)

Quetta ; altitude 1800 mètres, 80 000 âmes, 20 000 chameaux.
Huit cents kilomètres à l'ouest, au bout du train, la Perse dort dans un manteau de sable. C'est l'autre versant du monde et rien, sinon la contrebande, ne la rappelle ici.
Au nord de la ville, une petite route militaire traverse la zone des cultures, s'engage dans une plaine aride puis s'élève jusqu'au col de Kodjak et aux massifs de la frontière afghane où les tribus voisines de Quetta ont leurs pâturages d'été. Malgré l'excellente piste qui conduit de la frontière à Kandahar, le trafic est pratiquement inexistant et la petite douane de Chaman est une fournaise où rien ne passe, sauf le temps.
Vers le nord-est, un embranchement de la voie ferrée gagne Fort-Sandeman au pied des Monts du Waziristan. Les clans pathans qui les habitent - Massouds et Waziri - sont les plus coriaces de toute la frontière, tellement agressifs, experts en rapines et prompts à rompre leur parole, que les voisins sont unanimes à leur refuser la qualité de Musulmans et qu'il fallut quatorze expéditions punitives pour les convaincre qu'ils ne tenaient plus le bon bout.
Enfin, vers le sud, la ligne principale, doublée d'une mauvaise route, descend sur la plaine de l'Indus et Karachi par la Passe de Bolan qui, la transhumance venue, s'engorge d'immenses troupeaux de chameaux transis déferlant vers la tiédeur et l'herbe d'automne. 
Voilà les points cardinaux. Ils sont lointains. Ils situent, mais ne pèsent pas sur la ville qui vit pour elle entre sa gare pareille à un jouet Second Empire, son canal ensablé et vibrant de moustiques et les cantonnements de la garnison où l'appel des bags-pipes précède le matin. 
Nicolas Bouvier, L'usage du monde, Dessins de Thierry Vernet, Droz

dimanche 18 mars 2012

Havre



mardi 13 mars 2012

Valérie Rouzeau (10)


J'ai chu dans la neige l'autre jour
Après le Café Rouge vins fins
Sic mais pas sick juste étourdie
Sur le cul que j'ai rebondi
Un ange est passé juste après
Ma glissade sous le ciel blanchi
Ensuite un ramier a claqué 
Très fort des ailes j'ai sursauté 
Comme s'il avait giflé ma joue
Rompu ma minute de silence 
Pour me réveiller d'un seul coup
Alors je me suis remise sur pieds
Avec un flocon sur le nez
Le rire de l'ange et du ramier. 

 °°°

Je me fiche de perdre mémoire artificielle
Méga giga octets disk dur clef usb
Pour l'autre humaine organique fragile
Je porte le chapeau qui me va
Je ne suis pas au monde (étoile)
En vers marche à l'envers
Me désolidarise et me désactualise
Sors de l'écran dans la rue bruyante
Arbres en ligne platanes à suivre 
Pensées ruisselantes clignotantes 
Mes syllabes me refont les pieds 
Et tous mes souvenirs (étoile)
Je les inventerai (étoile)
Je les inventerai (étoile).

Valérie Rouzeau, Vrouz, La table ronde

samedi 10 mars 2012

Valérie Rouzeau (9)



 Bonne qu'à ça ou rien
Je ne sais pas nager pas danser pas conduire
De voiture même petite
Pas coudre pas compter pas me battre pas baiser
Je ne sais pas non plus manger ni cuisiner
(Vais me faire cuire un œuf)
Quant à boire c'est déboires
Mourir impossible présentement
Incapable de jouer ni flûte ni violon dingue
De me coiffer pétard de revendre la mèche
De converser longtemps
De poireauter beaucoup d'attendre un seul enfant
Pas fichue d'interrompre la rumeur qui se prend
Dans mes feuilles de saison.

°°°

Propriétaire de rien
Employée de personne
Ma vie me l'improvise
Au fur et à mesure
Apples et pears
I go upstairs
Argot rimé ficelle
Je grimpe à mon échelle
Quand m'éprouvette grenouille
Devinette météo
Avec vieux scoubidou
M'entête et perds mes vers
C'est pépins pour ma pomme
Je coupe en deux cette poire.

Valérie Rouzeau, Vrouz, La Table Ronde

mercredi 7 mars 2012

Jim Harrison (1)

15

Way up a sandy draw in the foothills
of the Whetstone Mountains I found cougar
tracks so fresh  damp sand was still
trickling in from the edges. For some reason
I knelt and sniffed them, quite sure 
I was being watched by a living rock
in the vast, heat-blured landscape.

Au bout d'une piste de sable sur les collines basses 
des Whetstone Mountains j'ai vu des empreintes de puma
si fraîches que le sable mouillé gouttait encore 
dedans. Je ne sais pourquoi, à genoux,
je me suis pris à les humer, absolument certain
d'être observé par la roche vivante
du vaste paysage troublé par la chaleur.



20

More lion prints in our creekbed.
Right now in the light, cool rain at midnight,
coyotes. Stunk stink laden in mist.
Hidden moon, I don't want to go home yet.
Older, the flavors of earth are more delicious.

D'autres empreintes de puma dans le ruisseau.
A l'instant en pleine lumière, pluie froide de minuit,
les coyotes. Les putois puent noyés de brume.
Lune cachée, je ne veux pas encore rentrer.
Plus vieilles, plus délicieuses les saveurs de la terre.
 
Jim Harrison, L'éclipse de lune de Davenport, et autres poèmes, La Table Ronde

dimanche 4 mars 2012

Japanese Floral Pattern Design (2)







Le Japon artistique -  Japanese Floral Pattern Design in the Art Nouveau Era. Chronicle books, San Francisco.

Japanese Floral Pattern Design (1)



Le Japon artistique -  Japanese Floral Pattern Design in the Art Nouveau Era. Chronicle books, San Francisco.