Si par exemple l'on tourne le dos à l'ignoble hôtel, on a encore, un matin d'été, la vision la plus rare de bois, d'eau et d'architecture heureusement mêlés : la Sesia avec ses prairies douces et ses rives feuillues, ses vieilles maisons blotties au-dessus, et la haute falaise couronnées, par les chapelles du chemin de Croix. La nuit, tout se confond dans une beauté plus divine encore. Les grappes d'obscurité de la ville, avec ses lumières scintillantes, se répandent dans les plis des collines, délicatement tracés au clair de lune contre le ciel mauve. Ici et là, la lune polit une sombre masse d'arbres, ou isole un campanile aussi pâle et aussi précis qu'un objet d'ivoire ; tandis que loin au dessus, le sommet de la falaise lance contre le ciel, avec une pureté de contour presque grecque, les dômes blancs et les arches de l'oratoire.
Edith Wharton, Paysages italiens, Payot & Rivages.