dimanche 28 février 2010
Marina Tsvétaïéva (1)
... J'aimerais vivre avec vous
Dans une petite ville,
Aux éternels crépuscules,
Aux éternels carillons,
Et dans une petite auberge de campagne —
Le tintement grêle
D'une pendule ancienne — goutte à goutte de temps.
Et parfois, le soir, montant d'une mansarde —
Une flûte,
Et le flûtiste lui-même à la fenêtre.
Et de grandes tulipes sur les fenêtres.
Et peut-être, ne m'aimeriez-vous même pas...
Au milieu de la chambre — un énorme poêle de faïence,
Sur chaque carreau — une image :
Rose, cœur et navire.
Tandis qu'à l'unique fenêtre —
Il neige, neige, neige.
Vous seriez allongé tel que je vous aime : paresseux,
Indifférent, léger.
Par instants le geste sec
D'une allumette.
La cigarette brûle et se consume,
Et longuement à son extrémité,
— Courte colonne grise — tremble
La cendre.
Vous n'avez même pas le courage de la faire tomber —
Et toute la cigarette vole dans le feu.
Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle suivi de Tentative de jalousie, Poésie/Gallimard
Dans une petite ville,
Aux éternels crépuscules,
Aux éternels carillons,
Et dans une petite auberge de campagne —
Le tintement grêle
D'une pendule ancienne — goutte à goutte de temps.
Et parfois, le soir, montant d'une mansarde —
Une flûte,
Et le flûtiste lui-même à la fenêtre.
Et de grandes tulipes sur les fenêtres.
Et peut-être, ne m'aimeriez-vous même pas...
Au milieu de la chambre — un énorme poêle de faïence,
Sur chaque carreau — une image :
Rose, cœur et navire.
Tandis qu'à l'unique fenêtre —
Il neige, neige, neige.
Vous seriez allongé tel que je vous aime : paresseux,
Indifférent, léger.
Par instants le geste sec
D'une allumette.
La cigarette brûle et se consume,
Et longuement à son extrémité,
— Courte colonne grise — tremble
La cendre.
Vous n'avez même pas le courage de la faire tomber —
Et toute la cigarette vole dans le feu.
Marina Tsvétaïéva, Le ciel brûle suivi de Tentative de jalousie, Poésie/Gallimard
Jim Morrison (1)
c'est drôle,
.................j'espère encore
que l'on va frapper à la porte
voilà ce que vous
gagnez à vivre parmi
..................les hommes
Si l'on frappait ? mes rêves
.................illusoires, mon maintien et
...................mon sang-froid voleraient en éclats
Le combat d'un pauvre poète
................pour ne pas tomber sous l'emprise
..........des romans, des jeux de hasard
.....................et du journalisme
........................***
Promenades dans les rues Nègres
......................du D.C. Bibliothèque
......................et librairies. Brique
......................orange sous le chaud soleil.
......................Magie des livres et des poètes
Puis le sexe vous donne la plus grande stimulation
Que vous ayez jamais connue
la paix, les livres perdent tout leur
charme et vous êtes rejeté
dans l'œil de la vision
Jim Morrison, Wilderness, Christian Bourgois/Titres
.................j'espère encore
que l'on va frapper à la porte
voilà ce que vous
gagnez à vivre parmi
..................les hommes
Si l'on frappait ? mes rêves
.................illusoires, mon maintien et
...................mon sang-froid voleraient en éclats
Le combat d'un pauvre poète
................pour ne pas tomber sous l'emprise
..........des romans, des jeux de hasard
.....................et du journalisme
........................***
Promenades dans les rues Nègres
......................du D.C. Bibliothèque
......................et librairies. Brique
......................orange sous le chaud soleil.
......................Magie des livres et des poètes
Puis le sexe vous donne la plus grande stimulation
Que vous ayez jamais connue
la paix, les livres perdent tout leur
charme et vous êtes rejeté
dans l'œil de la vision
Jim Morrison, Wilderness, Christian Bourgois/Titres
samedi 27 février 2010
Pierre Bergounioux (1)
le rouge
....Ternes et froides sont les couleurs du monde, verts les près et les bois, la mer, qui est bleue, aussi, comme le ciel, quand ils ne virent pas au gris, comme les murs de la ville et ses toits; nos pensées ordinaires, le cours de nos jours, l'interminable hiver. Il arrive qu'une lueur éclatante, rouge, surgisse dans le tableau. L'instant est critique. Il y a péril en la demeure. Il faut agir, s'écarter de toute urgence ou s'avancer résolument, fuir ou combattre, peut-être périr.
....Le rouge est essentiellement ambivalent, chargé de valeurs opposées mais pareillement fortes, prodigue ou redoutable, succulent, dominateur, hiératique et , quant au fond, indiscutable, un : la vie s'exalte. En négatif, c'est l'incendie, la plaie ouverte, l'hémorragie, la lave, la rouille, les bêtes venimeuses et les poisons, l'aspic, les fourmis, le serpent corail, la crête dressée du coq, la gueule écumante, les baies mortelles, l'argile stérile, désespérante, les voyants d'alerte, la fureur, l'ivresse, la honte, l'orgueil, les joues en feu, l'étendard de la révolte, l'intérieur caché de nos corps, la fièvre, la scarlatine, octobre, le soleil qui se couche "dans son sang qui se fige", la zone interdite, le manteau de bataille de César, la robe cardinalice, la capuche du bourreau, l'habit du diable, les parois de l'enfer. Il semble à Goethe, lorsqu'il entre sur le terrain battu par le canon français de Valmy, que l'air se colore de pourpre et c'est comme à travers un voile sanglant que tourbillonnent les choses aux yeux de qui voit rouge.
....Mais c'est aussi l'abondance et le raffinement, la viande saignante et les vins de la fête, les fruits les plus délicats, les crustacés, le poivre et le piment, le saumon, le rouget, la toge virile, le sacrifice, la magique lueur de la forge, la houppelande de Noël, la braise et le houx, le corail et les rubis, la bonne argile dont on tire la poterie, la tuile et la brique, la fertilité des sols volcaniques, le rideau de théâtre et le tapis qu'on déploie sous les pas puissants, la rosette, les véhicules de secours qui empruntent leur couleur au feu, au sang, la promesse empourprée de l'aurore, l'incarnat du printemps, la parfaite maturité, la révolution.
....Le temps, lorsqu'il passe au rouge, est fécond, chargé de possibles, précieux à l'égal des choses éphémères ou cachées, redoutables, qui en portent la livrée. C'est celui, rapide, vibrant, de l'évènement, la lueur de l'instant passé lequel rien ne sera plus comme avant.
....Vient l'après. La flamme charbonne. L'accablement succède à l'excitation, la nuit au jour, la saison noire à l'été hasardé de la Saint-Martin. L'heure pourpre tourne à l'ocre, au bistre, à la sépia.
....Il pleut des cendres.Pierre Bergounioux et Joël Leick, Couleurs, éditions Fata Morgana
Henri Michaux (3)
....................Je rame
J'ai maudit ton front ton ventre ta vie
J'ai maudit les rues que ta marche enfile
Les objets que ta main saisit
J'ai maudit l'intérieur de tes rêves
J'ai mis une flaque dans ton œil qui ne voit plus
Un insecte dans ton oreille qui n'entend plus
Une éponge dans ton cerveau qui ne comprend plus
Je t'ai refroidi en l'âme de ton corps
Je t'ai glacé en ta vie profonde
L'air que tu respires te suffoque
L'air que tu respires a un air de cave
Est un air qui a déjà été expiré
Qui a été rejeté par des hyènes
Le fumier de cet air personne ne peut plus le respirer
Ta peau est toute humide
Ta peau sue l'eau de la grande peur
Tes aisselles dégagent au loin une odeur de crypte
Les animaux s'arrêtent sur ton passage
Les chiens, la nuit, hurlent, la tête levée vers ta maison
Tu ne peux pas fuir
Il ne te vient pas une force de fourmi au bout du pied
Ta fatigue fait une souche de plomb en ton corps
Ta fatigue est une longue caravane
Ta fatigue va jusqu'au pays de Nan
Ta fatigue est inexpressible
Ta bouche te mord
Tes ongles te griffent
N'est plus à toi ta famme
N'est plus à toi ton frère
La plante de son pied est mordue par un serpent furieux
On a bavé sur ta progéniture
On a bavé sur le rire de ta fillette
On est passé en bavant devant le visage de ta demeure
Le monde s'éloigne de toi
Je rame
Je rame
Je rame contre ta vie
Je rame
Je me multiplie en rameurs innombrables
Pour ramer plus fortement contre toi
Tu tombes dans le vague
Tu es sans souffle
Tu te lasses avant même le moindre effort
Je rame
Je rame
Je rame
Tu t'en vas, ivre, attaché à la queue d'un mulet
L'inverse comme un immense parasol qui obscurcit le ciel
Et assemble les mouches
L'ivresse vertigineuse des canaux semicirculaires
Commencement mal écouté de l'hémiplégie
L'ivresse ne te quitte plus
Te couche à gauche
Te couche à droite
Te couche sur le sol pierreux du chemin
Je rame
Je rame
Je rame contre tes jours
Dans la maison de la souffrance tu entres
Je rame
Je rame
Sur un bandeau noir tes actions s'inscrivent
Sur le grand œil blanc d'un cheval borgne roule ton avenir
Je rame
Henri Michaux, Poésie pour pouvoir dans Face aux verrous, Gallimard
J'ai maudit ton front ton ventre ta vie
J'ai maudit les rues que ta marche enfile
Les objets que ta main saisit
J'ai maudit l'intérieur de tes rêves
J'ai mis une flaque dans ton œil qui ne voit plus
Un insecte dans ton oreille qui n'entend plus
Une éponge dans ton cerveau qui ne comprend plus
Je t'ai refroidi en l'âme de ton corps
Je t'ai glacé en ta vie profonde
L'air que tu respires te suffoque
L'air que tu respires a un air de cave
Est un air qui a déjà été expiré
Qui a été rejeté par des hyènes
Le fumier de cet air personne ne peut plus le respirer
Ta peau est toute humide
Ta peau sue l'eau de la grande peur
Tes aisselles dégagent au loin une odeur de crypte
Les animaux s'arrêtent sur ton passage
Les chiens, la nuit, hurlent, la tête levée vers ta maison
Tu ne peux pas fuir
Il ne te vient pas une force de fourmi au bout du pied
Ta fatigue fait une souche de plomb en ton corps
Ta fatigue est une longue caravane
Ta fatigue va jusqu'au pays de Nan
Ta fatigue est inexpressible
Ta bouche te mord
Tes ongles te griffent
N'est plus à toi ta famme
N'est plus à toi ton frère
La plante de son pied est mordue par un serpent furieux
On a bavé sur ta progéniture
On a bavé sur le rire de ta fillette
On est passé en bavant devant le visage de ta demeure
Le monde s'éloigne de toi
Je rame
Je rame
Je rame contre ta vie
Je rame
Je me multiplie en rameurs innombrables
Pour ramer plus fortement contre toi
Tu tombes dans le vague
Tu es sans souffle
Tu te lasses avant même le moindre effort
Je rame
Je rame
Je rame
Tu t'en vas, ivre, attaché à la queue d'un mulet
L'inverse comme un immense parasol qui obscurcit le ciel
Et assemble les mouches
L'ivresse vertigineuse des canaux semicirculaires
Commencement mal écouté de l'hémiplégie
L'ivresse ne te quitte plus
Te couche à gauche
Te couche à droite
Te couche sur le sol pierreux du chemin
Je rame
Je rame
Je rame contre tes jours
Dans la maison de la souffrance tu entres
Je rame
Je rame
Sur un bandeau noir tes actions s'inscrivent
Sur le grand œil blanc d'un cheval borgne roule ton avenir
Je rame
Henri Michaux, Poésie pour pouvoir dans Face aux verrous, Gallimard
vendredi 26 février 2010
Valérie Rouzeau (7)
...............................HOMMES
L'amour naître se trouve dans l'amour
L'âme où renaître se perd dans l'amour
Couilles con cœur et pieds ventre nuque
Des yeux aux genoux chevilles et poignets
Poitrine et cheveux de nous hommes hommes
Ho...mm...es..
L'âme en vienne en nous l'âme hors de nous
Valérie Rouzeau, Pas revoir suivi de Neige rien, La Table ronde / la petite vermillon
L'amour naître se trouve dans l'amour
L'âme où renaître se perd dans l'amour
Couilles con cœur et pieds ventre nuque
Des yeux aux genoux chevilles et poignets
Poitrine et cheveux de nous hommes hommes
Ho...mm...es..
L'âme en vienne en nous l'âme hors de nous
Valérie Rouzeau, Pas revoir suivi de Neige rien, La Table ronde / la petite vermillon
jeudi 25 février 2010
Philippe Jaccottet (5)
et, sans aller chercher la mort, le temps aussi,
tout près de moi, sur moi, j'en donne acte à mes deux yeux,
adjugé ! Sur la douleur, on en aurait trop long à dire.
Mais quelque chose n'est pas entamé par ce couteau
ou se referme après son coup comme l'eau derrière la barque."
Philippe Jaccottet, A la lumière d'hiver suivi de Pensées sous les nuages, Poésie/Gallimard
Pierre Reverdy (2)
La poésie a sa source à ce point de contact douloureux du réel extérieur et de la conscience humaine — à ce point où l'homme se désole de constater la supériorité de sa conscience sur les choses — qui n'en ont pas — et qu'elle soit en grande partie esclave de ces choses. Pour détrôner ces choses au profit de sa conscience, il les nomme — et, en les nommant, il s'empare et les domine. Mais il ne s'en empare et ne les domine qu'en les nommant comme il veut et en les pliant à sa volonté pour exprimer la réalité supérieure de son monde intérieur.
...
La poésie semble donc bien devoir rester le seul point de hauteur d'où il puisse encore, et pour la suprême consolation de ses misères, contempler un horizon plus clair, plus ouvert qui lui permette de ne pas complètement désespérer. Jusqu'à nouvel ordre — jusqu'au nouveau et peut-être définitif désordre — c'est dans ce mot qu'il faut aller chercher le sens que comportait autrefois celui de liberté.
dimanche 21 février 2010
Jean-Michel Maulpoix (1)
1. Avancer / se retourner2. Chercher / trouver
(...)
On se souvient qu’après avoir perdu Eurydice, morte de la morsure d’un serpent, Orphée descendit avec courage aux Enfers dans l’espoir de la ramener. Il y charma de ses chants le passeur, adoucit les trois Juges des Morts, suspendit les supplices des damnés, et finit par obtenir du cruel Hadès la permission de ramener son épouse parmi les vivants. À cela, Hadès mit une condition : qu’Orphée ne se retourne pas jusqu’à ce qu’Eurydice soit revenue sous la lumière du soleil. Or, par coupable impatience, Orphée ne tint pas sa promesse : entrevoyant la lumière du jour, il se retourna pour s’assurer que sa compagne le suivait et il la perdit pour toujours. C’est alors que commença la douloureuse errance qui fit de lui ce chanteur éploré capable d’entraîner à sa suite ces vies muettes que sont les arbres et les animaux sauvages…
Tel que ce mythe le laisse entendre, le chant d’amour naît de la perte : pour ramener à la lumière l’Objet perdu, la poésie va parmi les ombres et traite avec elles. Il peut arriver qu’elle les charme et soit tout près de les vaincre ou de les convaincre… Elle ne descend pas aux Enfers par esprit de conquête, mais par amour, pour tenter de sauver l’amour…Que cherche donc la poésie, sinon, comme Henri Michaux, à « approcher le problème d’être » ?(...)
Moins chantante qu’interrogative, moins inspirée que question-neuse, la poésie moderne est un tissage de mots dans la perplexité. Par la précision de ses tours, elle entrouvre un peu la langue sur notre ignorance. Peut être dit poète, celui qui nous rappelle, dans le vif du langage, que ce monde n’est pas maîtrisé. Celui qui nous rouvre (en sa profondeur) cet espace que nous croyions fermé. Celui qui nous invite à nous remettre en chemin. Celui qui nous enjoint d’exister, tout simplement. « Que reste-t-il ? Sinon cette façon de poser la question qui se nomme la poésie » écrit Philippe Jaccottet dans Éléments d’un songe.
C’est ainsi à une espèce de retournement radical que la modernité nous donne à assister : l’inspiré naguère protégé des dieux est devenu l’être perplexe qui protège la question.
(...)
Faire en sorte que cette vie soit un peu moins absurde, voilà ce que l’on pourrait demander au poète. Ne l’embellissez pas artificiellement, ne nous trompez pas sur la vérité des choses, mais montrez-nous plutôt de quelle pâte nous sommes faits et combien il entre de rêve et de désir dans la composition de nos jours. Expliquez-nous d’un mot, dans le regard de la passante, les conditions de l’espérance et de l’amour. Dites-nous ce qu’est le temps de vivre et de mourir. Empêchez-nous donc de nous perdre et de nous jeter dans ce qui nous dévore. On ne doit attendre rien moins du poète que la vérité toute nue et tout entière, non pas abstraite et générale, mais concrète et radicale, et telle surtout que s’y trouvent ainsi réévaluées nos raisons de vivre.Au poète d’établir l’espace où puissent entrer la plainte et la louange : tenir le langage de la valeur et du sentiment.
Au poète d’instaurer la résistance du mètre au chiffre, de la mesure à la spéculation et du rythme de la parole humaine aux bruits de la technique et du négoce.
Au poète de faire montre d’une certaine tenue (autre forme de résistance) dans ce qui existe aussi bien que de ce qui existe : cohésion et cohérence, en définitive, de l’être et du milieu en son parler soutenu.
Au poète de montrer les liens, puisque l’homme à travers l’histoire n’a fait qu’accroître la distance et la séparation. Ce motif constituera le dernier temps de mon développement…
3. Couper / lier
La création poétique a pour fondement la capacité à discerner, établir, multiplier et révéler des rapports. De ces rapports viennent les images. Pierre Reverdy définit ainsi l’aptitude du poète :
Sa faculté majeure est de discerner, dans les choses, des rapports justes mais non évidents qui, dans un rapprochement violent, seront susceptibles de produire, par un accord imprévu, une émotion que le spectacle des choses elles-mêmes serait incapable de nous donner.
Il s’agit donc de produire une émotion seconde, de nature esthétique, issue du rapport lui-même, et dont la force tient aussi bien au renouvellement de la vision qu’à son extension inattendue : voici qu’en ce nouveau phrasé, le réel se montre à la fois plus large et plus serré, plus étendu et plus cohérent. C’est là une manière de réplique à l’usure du temps quotidien : à la monotonie de la répétition, la servitude de la fatalité.
...
Jean-Michel Maulpoix et Cie
René Char (2)
Le poème est l'amour réalisé du désir demeuré désir.
René Char, En trente-trois morceaux et autres poèmes, suivi de Sous ma casquette amarante, Poésie / Gallimard
Pierre Reverdy (1)
La poésie n’est certainement pas dans les choses, autrement tout le monde l’y découvrirait aisément, comme tout le monde trouve si naturellement le bois dans l’arbre et l’eau dans la rivière ou l’océan. Il n’existe pas non plus par conséquent, de choses ni de mots plus poétiques les uns que les autres, mais toutes choses peuvent devenir à l’aide des mots poésie, quand le poète parvient à mettre son empreinte dessus. La poésie n’est en rien ni nulle part, c’est pourquoi elle peut être mise en tout et partout. Mais rien ne s’opère sans une véritable transmutation des valeurs. Dans l’impuissance à la saisir, à l’identifier où que ce soit, on a préféré déclarer qu’elle régnait partout et qu’il suffisait de savoir l’y découvrir. Or, il est parfaitement évident qu’elle est plutôt une absence, un manque au cœur de l’homme, et, plus précisément dans le rapport que le poète a le don de mettre à la place de cette absence, de ce manque. Et il n’y a poésie réelle que là où a été comblé ce vide qui ne pouvait absolument l’être par aucune autre activité ou manière réelle de la vie.
Pierre Reverdy, "Circonstances de la poésie", dans Sable mouvant, Au soleil du plafond, La Liberté des mers, suivi de Cette émotion appelée poésie, édition d’Étienne-Alain Hubert, Poésie/Gallimard, 2003
Poezibao : Notes sur la poésie
Philippe Jaccottet (4)
Il y a dans la poésie, pas nécessairement chez les grands poètes, pourvu que le ton soit juste, des moments qui sont comme le bruit du torrent ou le rire d'Aglaé, des ouvertures ou des entrebâillements sur un espace autre, qui ne serait pas un autre monde, mais notre monde compris autrement. Ce qui rejoint la méditation de Musil sur ce qu'il appelle l'autre état, " der andere Zustand ", qu'il rapproche plutôt de l'état mystique, mais qui est aussi un état poétique : un état dans lequel notre perception du monde est modifiée. Modifiée, naturellement, dans un sens qui le rend plus habitable. C'est aussi ce que Rilke appelle " l'Ouvert ", où les poètes, les anges, les bêtes aussi à leur manière, circulent sans difficulté parce qu'il n'y a plus d'obstacle, que la respiration est possible. Et je crois que toutes les œuvres poétiques véritables, et plus nettement encore les œuvres musicales, nous conduisent plus ou moins près de ce seuil.
Extrait d'un entretien de Philippe Jaccottet avec Monique Pétillon, paru dans le Monde des Livres, le 15 juillet 1994.
Poezibao : Notes sur la poésie
Georges Perros (2)
A force de vivre je crois
que ce qui me reste de foi
je m'excuse c'est la paresse
Par paresse j'ai fait ceci
et cela que ne devais faire
Aussi bien me suis-je abstenu
non par morale ou par vertu
de travaux pour moi secondaires
et qui sont pourtant répandus
à tel point que ne pas les faire
est mal vu Si je vis en marge
c'est par goût d'une liberté
qui passe pour anecdotique
je m'en soucie peu Je n'ai pas
le complexe du temps passé
de ce que je fus même si
j'en dois tirer quelque avantage
Je recommencerai demain
à n'être que ce rien de rien
qui n'a dans les mains dans les poches
dans le crâne que ce rien-là
et ce n'est pas parce qu'en vers
très contestables d'un côté
comme de tout autre aussi bien
je proclame ma nullité
qu'il faut la prendre à la légère
Je me passe très bien de tout
ce qui peut faire vivre un homme
J'ai besoin d'un peu d'argent pour
qu'on mange autour de moi Je fais
rien que pour cela nécessaire
Bref déjà mort pour vous pour vous
mes amis que j'aimais tant voir
mais dénués de la tendresse
que je trouve parfois sans rire
au coin d'une ruelle où bat
le linge mouillé que la nuit
va rendre sec Tant pis pour moi
qui n'aime que la solitude
et qui ne tourne dans mon lit
que par désir d'y retourner
Mais les hommes sont trop fermés
les hommes aussi bien moi-même
j'en suis un à ne pas douter
mais qu'est-ce qu'un homme Et je m'aime
un tout petit peu Il le faut
pour supporter l'amour des autres.
Mais on m'a déjà dit souvent
que le moi n'était bon prophète
que dans l'absence stupéfaite
d'un miroir sans équivalent
Tout ce que j'ai fait dans ma vie
ou négligé de faire c'est
moins par volonté que besoin
de m'étonner d'être autre chose
que ce corps qui me trahirait
sans crier gare un jour prochain
et sans m'avoir laissé le soin
de le finir en juste cause.
Georges Perros, Une vie ordinaire, Poésie/Gallimard
mardi 16 février 2010
Henri Michaux (2)
........COMME PIERRE DANS LE PUITS
Je cherche un être à envahir
Montagne de fluide, paquet divin,
Où es-tu mon autre pôle ? Étrennes toujours remises,
Où es-tu marée montante ?
Refouler en toi le bain brisant de mon intolérable tension !
Te pirater.
Présence de soi : outil fou.
On pèse sur soi
On pèse sur sa solitude
On pèse sur les alentours
On pèse sur le vide
On drague.
Monde couturé d'absences
Millions de maillons de tabous
Passé de cancer
Barrage de génufléchisseurs et des embretellés ;
Oh ! Heureux médiocres
Tettez le vieux et la couenne des siècles
et la civilisation des désirs à bon marché
Allez, c'est pour vous tout ça.
La rage n'a pas fait le monde
mais la rage y doit vivre.
Camarades du "Non" et du crachat mal rentré,
Camarades... mais il n'y a pas de camarades du "Non".
Comme pierre dans le puits mon salut à vous !
Et d'ailleurs, Zut !
Henri Michaux, PLUME, précédé de LOINTAIN INTÉRIEUR, nrf Gallimard, 1974
Je cherche un être à envahir
Montagne de fluide, paquet divin,
Où es-tu mon autre pôle ? Étrennes toujours remises,
Où es-tu marée montante ?
Refouler en toi le bain brisant de mon intolérable tension !
Te pirater.
Présence de soi : outil fou.
On pèse sur soi
On pèse sur sa solitude
On pèse sur les alentours
On pèse sur le vide
On drague.
Monde couturé d'absences
Millions de maillons de tabous
Passé de cancer
Barrage de génufléchisseurs et des embretellés ;
Oh ! Heureux médiocres
Tettez le vieux et la couenne des siècles
et la civilisation des désirs à bon marché
Allez, c'est pour vous tout ça.
La rage n'a pas fait le monde
mais la rage y doit vivre.
Camarades du "Non" et du crachat mal rentré,
Camarades... mais il n'y a pas de camarades du "Non".
Comme pierre dans le puits mon salut à vous !
Et d'ailleurs, Zut !
Henri Michaux, PLUME, précédé de LOINTAIN INTÉRIEUR, nrf Gallimard, 1974
Henri Michaux (1)
.........................PENSÉES
Penser, vivre, mer peu distincte ;
Moi — ça — tremble,
Infini incessamment qui tressaille.
Ombres de mondes infimes,
ombres d'ombres,
cendres d'ailes.
Pensées à la nage merveilleuse,
qui glissez en nous, entre nous, loin de nous,
loin de nous éclairer, loin de rien pénétrer ;
étrangères en nos maisons,
toujours à colporter,
poussières pour nous distraire et nous éparpiller la vie.
Henri Michaux, PLUME, précédé de LOINTAIN INTÉRIEUR, nrf Gallimard, 1974
Penser, vivre, mer peu distincte ;
Moi — ça — tremble,
Infini incessamment qui tressaille.
Ombres de mondes infimes,
ombres d'ombres,
cendres d'ailes.
Pensées à la nage merveilleuse,
qui glissez en nous, entre nous, loin de nous,
loin de nous éclairer, loin de rien pénétrer ;
étrangères en nos maisons,
toujours à colporter,
poussières pour nous distraire et nous éparpiller la vie.
Henri Michaux, PLUME, précédé de LOINTAIN INTÉRIEUR, nrf Gallimard, 1974
lundi 15 février 2010
Guillevic (8)
On veut toujours
Être au centre
Et en même temps
A la limite,
A la frontière —
On ne sait de quoi.
..................*
A cette nature
En dehors de moi
Ce que je demande
C'est du présent
A quoi s'accrocher,
A épouser.
..................*
Toi aussi, comme l'eau,
Tu es aux limites
Tu ne sais pas de quoi.
Guillevic, RELIER, poèmes 1938 - 1996, nrf Gallimard
Être au centre
Et en même temps
A la limite,
A la frontière —
On ne sait de quoi.
..................*
A cette nature
En dehors de moi
Ce que je demande
C'est du présent
A quoi s'accrocher,
A épouser.
..................*
Toi aussi, comme l'eau,
Tu es aux limites
Tu ne sais pas de quoi.
Guillevic, RELIER, poèmes 1938 - 1996, nrf Gallimard
dimanche 14 février 2010
Charles Juliet (2)
(...)
.......Vous ai-je déjà dit que je compose la plupart de mes poèmes en marchant ? Aujourd'hui, j'ai dû parcourir des kilomètres à l'intérieur des bois, sourd au chant des oiseaux, ne voyant presque rien de ce qui m'entourait. J'étais aux prises avec un poème qui m'a donné du mal. Curieusement, ce poème parle de jours vides, d'ennui, de ténèbres, alors que j'étais d'humeur sereine, et que juste avant que ne bruissent les premiers mots, je prenais du plaisir à cette balade, à tout ce que m'offrait cette belle journée de printemps.
(...).......Vous ai-je déjà dit que je compose la plupart de mes poèmes en marchant ? Aujourd'hui, j'ai dû parcourir des kilomètres à l'intérieur des bois, sourd au chant des oiseaux, ne voyant presque rien de ce qui m'entourait. J'étais aux prises avec un poème qui m'a donné du mal. Curieusement, ce poème parle de jours vides, d'ennui, de ténèbres, alors que j'étais d'humeur sereine, et que juste avant que ne bruissent les premiers mots, je prenais du plaisir à cette balade, à tout ce que m'offrait cette belle journée de printemps.
Charles Juliet, Dans la lumière des saisons, P.O.L
Georges Perros (1)
J'ai besoin d'amour mais m'en passe
et quand on monte l'escalier
souvent je ferme à double tour
pour ne pas souffrir
de voir femme ou homme apparaître
pour me faire souffrir encore
L'amitié j'en connais le baume
et la douleur bien davantage
Allez plus on avance en âge
moins on a de temps à donner
à ceux qui n'ont besoin de nous
que luxueusement. C'est tout
ce que ce soir j'ai à chanter.
Georges Perros, Une vie ordinaire, Poésie/Gallimard
et quand on monte l'escalier
souvent je ferme à double tour
pour ne pas souffrir
de voir femme ou homme apparaître
pour me faire souffrir encore
L'amitié j'en connais le baume
et la douleur bien davantage
Allez plus on avance en âge
moins on a de temps à donner
à ceux qui n'ont besoin de nous
que luxueusement. C'est tout
ce que ce soir j'ai à chanter.
Georges Perros, Une vie ordinaire, Poésie/Gallimard
Charles Juliet (1)
30 octobre
(...) .......J'ai passé ma journée à marcher sur les collines. Des écharpes de brume traînaient dans la plaine, mais sur les hauteurs, une lumière dorée exaltait les ocres, les bruns, les rouges des vignes et des arbres qui brûlaient dans l'air immobile.
.......Si vous saviez combien j'aime l'automne, combien je me sens accordé à cette saison. Les ardeurs de l'été ont pris fin, et avec elles, les tensions, parfois même le mal-être qu'elles entraînent. Une douceur est là, présente dans l'air, les lumières, les ciels qui pâlissent. En elle se profile la menace qui donne tant de prix à la splendeur de ces journées où la vie jette ses derniers feux. (...)
.......J'ai quitté les vignes, et grimpant sur les plus hautes collines, me suis enfoncé dans les bois. La voûte brune des frondaisons laissait filtrer une lumière rousse, chaude, qui répondait assez bien à celle qui régnait en moi. J'ai marché pendant une ou deux heures, goûtant le silence, humant l'air humide où flottait une odeur de champignons, observant les effets des rayons du soleil sur les troncs et les feuilles. Marcher dans cette lumière était un pur enchantement.
.......Cet enchantement n'a pas duré. Chaque fois que je suis en communion avec la nature, vient un moment où je découvre combien elle nous est étrangère, et la pensée que nos préoccupations, nos ennuis, nos angoisses, notre inguérissable misère, ne trouvent en elle aucun écho, me peine, me donne le sentiment d'être rejeté, éteint sur-le-champ les plaisirs dont elle me comble.
(...) .......Si vous saviez combien j'aime l'automne, combien je me sens accordé à cette saison. Les ardeurs de l'été ont pris fin, et avec elles, les tensions, parfois même le mal-être qu'elles entraînent. Une douceur est là, présente dans l'air, les lumières, les ciels qui pâlissent. En elle se profile la menace qui donne tant de prix à la splendeur de ces journées où la vie jette ses derniers feux. (...)
.......J'ai quitté les vignes, et grimpant sur les plus hautes collines, me suis enfoncé dans les bois. La voûte brune des frondaisons laissait filtrer une lumière rousse, chaude, qui répondait assez bien à celle qui régnait en moi. J'ai marché pendant une ou deux heures, goûtant le silence, humant l'air humide où flottait une odeur de champignons, observant les effets des rayons du soleil sur les troncs et les feuilles. Marcher dans cette lumière était un pur enchantement.
.......Cet enchantement n'a pas duré. Chaque fois que je suis en communion avec la nature, vient un moment où je découvre combien elle nous est étrangère, et la pensée que nos préoccupations, nos ennuis, nos angoisses, notre inguérissable misère, ne trouvent en elle aucun écho, me peine, me donne le sentiment d'être rejeté, éteint sur-le-champ les plaisirs dont elle me comble.
Charles Juliet, Dans la lumière des saisons, P.O.L
lundi 8 février 2010
William Cliff (3)
Symphonie (extrait)
...
grave sommeil image de la mort
où vous plongez ô mes frères mortels
sommeil qui répare de leurs efforts
vos corps voués au coffre universel
pompe nocturne effrayant rituel
où s'en vont chaque nuit toutes les bêtes
qui depuis leur naissance le répètent
jusqu'au sommeil dont on ne revient plus
ah ! que ne peut-on du sommeil renaître
avec un cœur moins seul et moins reclus !
je suis courbé la tête basse
jaloux et triste pensant à la roche
de souffrance qui est notre terrasse
et qui nous mord de sa force féroce
quelques légers nuages très véloces
d'affections heureuses toujours la voilent
mais ce ne sont que de passagers voiles
qui ne peuvent empêcher que le roc
où est bâtie notre maison fatale
soit la souffrance forte comme un bloc
je me suis étendu dans l'air nocturne
appelant le sommeil qui nous délivre
des fers trop fermes de la vie diurne
et des raisons qu'on apprend dans les livres
ainsi je suis resté oui ainsi suis-je
resté un temps comme un cadavre inerte
laissant tourner dans l'orbe de ma tête
les images sans suite qui nous viennent
quand nous nous laissons être la conquête
du vieux sommeil de la nature humaine
entièrement je contemple ta forme
entièrement je ressens ta délice
entièrement je me sens un pauvre homme
devant ta forme nue qui me résiste
entièrement je cherche ce qui glisse
dans le voyage de mon rêve je
voudrais entièrement quitter tout ce
qui n'est pas dans ta forme dure et claire
afin d'être un autre homme et que mon seul
bonheur sur terre soit d'être en ton être
et aujourd'hui que tombe régulière
la pluie qui me dit n'être rien sur terre
et que ton corps s'éloigne loin de moi
entièrement ma tête trop légère
flotte comme un nuage qui là-bas
passe venu des lointaines chimères
pour retomber en gouttes sur le toit
entièrement qui par leur propre poids
coulent passivement dans les gouttières
pour disparaître entièrement en bas...
et refaisant un effort de mémoire
je révoque ta forme délicieuse
ton torse pur large comme une armoire
tes cuisses tes pieds ta queue lumineuse
ta fesse étroite ton aisselle creuse
où nichent les parfums les plus puissants
mais je suis si fatigué que mon chant
entièrement s'échappe avec la pluie
dont le tambourinement incessant
entièrement finit ma symphonie
William Cliff, Épopées, La table ronde
...
grave sommeil image de la mort
où vous plongez ô mes frères mortels
sommeil qui répare de leurs efforts
vos corps voués au coffre universel
pompe nocturne effrayant rituel
où s'en vont chaque nuit toutes les bêtes
qui depuis leur naissance le répètent
jusqu'au sommeil dont on ne revient plus
ah ! que ne peut-on du sommeil renaître
avec un cœur moins seul et moins reclus !
je suis courbé la tête basse
jaloux et triste pensant à la roche
de souffrance qui est notre terrasse
et qui nous mord de sa force féroce
quelques légers nuages très véloces
d'affections heureuses toujours la voilent
mais ce ne sont que de passagers voiles
qui ne peuvent empêcher que le roc
où est bâtie notre maison fatale
soit la souffrance forte comme un bloc
je me suis étendu dans l'air nocturne
appelant le sommeil qui nous délivre
des fers trop fermes de la vie diurne
et des raisons qu'on apprend dans les livres
ainsi je suis resté oui ainsi suis-je
resté un temps comme un cadavre inerte
laissant tourner dans l'orbe de ma tête
les images sans suite qui nous viennent
quand nous nous laissons être la conquête
du vieux sommeil de la nature humaine
entièrement je contemple ta forme
entièrement je ressens ta délice
entièrement je me sens un pauvre homme
devant ta forme nue qui me résiste
entièrement je cherche ce qui glisse
dans le voyage de mon rêve je
voudrais entièrement quitter tout ce
qui n'est pas dans ta forme dure et claire
afin d'être un autre homme et que mon seul
bonheur sur terre soit d'être en ton être
et aujourd'hui que tombe régulière
la pluie qui me dit n'être rien sur terre
et que ton corps s'éloigne loin de moi
entièrement ma tête trop légère
flotte comme un nuage qui là-bas
passe venu des lointaines chimères
pour retomber en gouttes sur le toit
entièrement qui par leur propre poids
coulent passivement dans les gouttières
pour disparaître entièrement en bas...
et refaisant un effort de mémoire
je révoque ta forme délicieuse
ton torse pur large comme une armoire
tes cuisses tes pieds ta queue lumineuse
ta fesse étroite ton aisselle creuse
où nichent les parfums les plus puissants
mais je suis si fatigué que mon chant
entièrement s'échappe avec la pluie
dont le tambourinement incessant
entièrement finit ma symphonie
William Cliff, Épopées, La table ronde
mardi 2 février 2010
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